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Transaktionen

0143 - Compagnie Financière Michelin

Recommandation dans l'affaire Compagnie Financière Michelin du 11 octobre 2002

Offre publique d’échange de Compagnie Générale des Etablissements Michelin, Clermont-Ferrand, France, pour toutes les actions au porteur de Compagnie Financière Michelin, Granges-Paccot

A.
Compagnie Financière Michelin ("CFM") est une société en commandite par actions dont le siège est à Granges-Paccot, dans le canton de Fribourg. Son capital-actions de CHF 1'404'831'200 est divisé en 11'698'312 actions nominatives d’une valeur nominale de CHF 100 chacune et en 1'175'000 actions au porteur d’une valeur nominale de CHF 200 chacune. Les actions au porteur sont cotées à la SWX Swiss Exchange.

B.
Compagnie Générale des Etablissements Michelin ("CGEM") est une société en commandite par actions dont le siège est à Clermont-Ferrand, dans le Puy-de-Dôme, France. Son capital-actions de EUR 272'016'032 est divisé en 136'008'016 actions nominatives d’une valeur nominale de EUR 2 chacune. Les actions nominatives sont cotées au Premier Marché d’Euronext Paris SA. CGEM détient directement et indirectement par l’intermédiaire de sa filiale à 100% Spika SA, Clermont-Ferrand, 11'697'530 actions nominatives et 715'407 actions au porteur CFM, correspondant à 93.45% du capital et 96.42% des droits de vote de CFM.

C.
Le 3 octobre 2002, CGEM a annoncé dans les médias électroniques qu'elle présenterait une offre publique d'échange aux actionnaires de CFM. Les actionnaires qui présentent leurs actions CFM à l'offre recevront, pour chaque action au porteur, 13 actions nominatives de CGEM. En vertu de l’autorisation de l’assemblée générale mixte des actionnaires du 18 mai 2001, la gérance de CGEM a décidé le 2 octobre 2002 d’augmenter le capital de CGEM par l’émission d’un maximum de 5'974'709 nouvelles actions nominatives pour honorer la présente offre. L'offre est soumise à la condition que les nouvelles actions nominatives CGEM émises dans le cadre de l’offre soient cotées et admises au négoce au Premier Marché d’Euronext Paris SA, au plus tard à la date d’exécution de l’offre.

Le 7 octobre 2002, l'annonce préalable de CGEM a été publiée dans des journaux en allemand et en français, de manière à atteindre une diffusion nationale.

D.
Une délégation composée de Mme Anne Héritier Lachat (présidente de la délégation), M. Alfred Spörri et M. Raymund Breu a été désignée pour examiner la transaction.


Considérants:

1. Annonce préalable

Selon l'art. 7 al. 1 OOPA, l'offrant peut annoncer une offre avant la publication du prospectus (annonce préalable). L'art. 8 OOPA précise qu'une telle annonce doit être publiée dans deux ou plusieurs journaux en allemand et en français, de manière à atteindre une diffusion nationale (al. 1). Elle doit être communiquée à l'un au moins des principaux médias électroniques diffusant des informations boursières (al. 2), et selon la pratique de la Commission des OPA, être effectivement publiée par l’un d’eux dans son entier (recommandation Cementia Holding AG, c. 1.1).
L'annonce préalable de CGEM a été diffusée dans les médias électroniques le 3 octobre 2002. Elle a été publiée dans la presse le 7 octobre 2002, soit deux jours de bourse plus tard. L’annonce préalable a donc été faite valablement le 3 octobre 2002 (recommandation Fotolabo SA du 29 mars 1999, c. 1).

2. Non-application des règles sur le prix minimum de l’offre

CGEM détient déjà directement et indirectement 96.42% des droits de vote de CFM. L’offre de CGEM ne porte donc pas sur des titres de participation dont l’acquisition déclencherait une offre obligatoire selon l’art. 10 al. 4 OOPA. CGEM n’est par conséquent pas liée par les règles sur le prix minimum de la loi sur les bourses.

3. Action de concert

Selon l’art. 11 OOPA et l’art. 15 al. 2 lit. c OBVM-CFB, l’offrant est réputé agir de concert avec l’ensemble des membres de son groupe de sociétés.
En l’espèce, la société visée CFM est une filiale contrôlée directement et indirectement à 96.42% par CGEM.  Par conséquent CGEM et CFM, ainsi que l’ensemble des sociétés contrôlées par elles, agissent de concert en vue de cette offre. Toutes ces sociétés et d’éventuelles autres personnes agissant de concert avec CGEM ou CFM doivent se conformer aux obligations prévues à l’art. 12 OOPA.

4. Rapport du conseil de la société visée

4.1 L’art. 31 al. 1 OOPA requiert que le conseil d’administration de la société visée se prononce dans son rapport sur d’éventuels conflits d’intérêts de ses membres ou de la direction supérieure. Le conseil d’administration doit se prononcer sur les conséquences financières de l’offre pour ces personnes. Ainsi, le rapport doit préciser si les relations contractuelles avec les membres du conseil et de la direction générale seront poursuivies à des conditions semblables ou indiquer dans le cas contraire les modifications prévues. Les montants d’éventuelles primes spéciales ou d’indemnités de départ doivent également être mentionnés séparément pour chaque personne (Recommandation Axantis Holding AG du 15 décembre 2000, c. 5.3).
Le rapport du conseil d’administration de CFM expose sous le titre "Position des membres de l’Administration" que deux de ses membres sont également gérants associés commandités de CGEM, alors que le troisième a occupé la même fonction jusqu’à récemment. Le rapport précise qu’aucune modification concernant la composition de l’administration ou les conditions du mandat de ses membres n’est prévue. Par conséquent, la première condition de l’art. 31 al. 1 OOPA est remplie en l’espèce.

4.2 Un potentiel de conflits d’intérêts des membres du conseil d’administration étant établi, le rapport doit indiquer les mesures prises par la société visée pour éviter que ces conflits éventuels ne lèsent les destinataires de l’offre (art 31 al. 3 OOPA).
Le rapport du conseil d’administration précise que ce dernier a mandaté la société Associés en Finance, Paris, pour vérifier l’adéquation financière de l’offre (attestation d’équité ou "fairness opinion").

4.3 Dans le cas où le conseil d’administration se fonde sur une évaluation indépendante pour justifier sa prise de position par rapport à l’offre, cette attestation d’équité fait partie intégrante du rapport du conseil d’administration. L’attestation d’équité doit être publiée en même temps que le rapport et être motivée de manière semblable. L’auteur d’une attestation d’équité doit présenter les mêmes garanties que l’organe de contrôle chargé selon l’art. 25 OOPA du contrôle d’une offre avant sa publication, et de ce fait, disposer de la même habilitation et être soumis à la même surveillance (dans ce sens, recommandation Think Tools du 17 mai 2002, c. 6.3). Cette exigence est justifiée par l’importance de l’attestation d’équité pour les destinataires de l’offre. Le recours à une tierce personne pour vérifier l’équité de l’offre, nécessaire précisément dans les cas délicats où un potentiel de conflits d’intérêts existe, n’a de sens que si cette tierce personne présente l’indépendance et la crédibilité requises. Selon l’art 25 al. 1 LBVM, est réputé qualifié pour effectuer le contrôle d’une offre un réviseur reconnu par l’autorité de surveillance ou un négociant.

4.3.1 La Commission des OPA a déjà accepté par le passé une évaluation de titres faite par une entité étrangère (recommandation Stratec Holding du 26 mars 1999, c. 5). Le conseil d’administration de la société visée est en principe libre – sous réserve des exigences de l’art. 25 al. 1 LBVM – dans le choix de la personne qu’il charge de fournir une telle évaluation ou une attestation d’équité. Toutefois, si l’entité choisie n’est pas reconnue en tant que réviseur ou autorisée en tant que négociant par la Commission fédérale des banques, cette entité doit être habilitée par la législation étrangère équivalente et soumise à la surveillance appropriée d’une autorité de surveillance étrangère.
Associés en Finance a effectué un grand nombre d’évaluations en tant qu’expert indépendant agréé au sens de l’art. 5-7-1 du Règlement Général du Conseil des Marchés Financiers ("CMF"). Le CMF est l’autorité française compétente en matière d’offres publiques d’acquisition. Selon la disposition précitée, cet expert indépendant est appelé à apprécier l’évaluation des titres de la société visée dans les cas d’offres publiques d’échange correspondant à la présente offre. L’agrément de cet expert doit être préalablement soumis au CMF. Les documents présentés à la Commission des OPA démontrent que le bureau Associés en Finance a déjà été chargé à de multiples reprises d’une telle appréciation conformément à la législation française et avec l’agrément d’une autorité française. Par conséquent, il convient de considérer que le bureau Associés en Finance bénéficie d’une habilitation correspondante et est soumis à la surveillance d’une autorité correspondante. 

4.3.2 L’attestation d’équité d’Associés en Finance est jointe au prospectus d’offre. De plus, l’ensemble des éléments et des méthodes d’évaluations permettant à Associés en Finance de parvenir à la conclusion que l’offre de CGEM est équitable sont exposés dans l’attestation d’équité. L’attestation d’équité est ainsi suffisamment motivée au sens de l’art. 29 al. 4 OOPA.

4.4 L'art. 30 al. 1 OOPA prévoit que le rapport doit indiquer quelles sont les intentions de chaque actionnaire détenant plus de 5% des droits de vote, si ces intentions sont connues du conseil d'administration. A l’exception de CGEM, aucun actionnaire ou groupe d’actionnaires ne détient plus de 5% des droits de vote. Par conséquent, cette condition est également remplie en l'espèce.

5. Suppression du délai de carence et réduction de la période d’offre à 10 jours de bourse

L'offre a été soumise à l'examen de la Commission des OPA avant sa publication. Elle inclut le rapport du conseil d'administration de la société visée. L’offrant détient avant la publication de l’offre la majorité des droits de vote de la société visée. Toutes les conditions requises étant remplies, l'offrant sera libéré de l'obligation de respecter le délai de carence (14 al. 2 OOPA) et la période d’offre sera réduite à dix jours de bourse (14 al. 3 OOPA).

6. Condition

L’offre de CGEM est soumise à la condition que les nouvelles actions nominatives CGEM émises dans le cadre de l’offre soient cotées et admises au négoce au Premier Marché d’Euronext Paris SA, au plus tard à la date d’exécution de l’offre. Selon le calendrier indicatif, l’offre sera exécutée le 2 décembre 2002, sous réserve premièrement d’éventuelles prolongations de la période d’offre conformément à l’art. 14 al. 4 OOPA et deuxièmement sous réserve du considérant 7 ci-dessous.
Cette condition est interprétée par la Commission des OPA comme permettant d’une part de surseoir à l’exécution de l’offre (condition suspensive) et d’autre part de renoncer à l’offre si la condition n’est pas réalisée (condition résolutoire).
La Commission des OPA a déjà autorisé de telles conditions résolutoires (voir recommandation Stratec Holding du 26 mars 1999, c. 3 ; recommandation Rentenanstalt du 17 septembre 2002, c. 3.6). La cotation et l’admission au négoce à Euronext Paris SA des actions offertes en échange sont dans l’intérêt des destinataires de l’offre. L’offrant a dans ce cadre confirmé à la Commission des OPA qu’il a pris et prendra toutes les mesures nécessaires à la cotation et l’admission en temps utile des nouveaux titres. Par conséquent, cette condition est autorisée aussi bien en tant que condition suspensive au sens de l’art. 12 al. 1 OOPA que condition résolutoire au sens de l’art. 13 al. 4 OOPA.

7. Prolongation du délai d’exécution de l’offre

Dans l’hypothèse où l’offre se déroulerait conformément au calendrier indicatif, son exécution devrait intervenir selon l’art. 14 al. 6 OOPA le 2 décembre 2002 au plus tard. CGEM requiert une prolongation de ce délai jusqu’au 20 décembre 2002.
La prolongation du délai d’exécution de l’offre est directement liée à la présence de la condition résolutoire (recommandation Messe Zürich AG du 16 mai 2001, c. 4.2). Une dérogation à l’art. 14 al. 6 OOPA est justifiée dans ce cas par l’intérêt prépondérant d’éviter une cession en retour des titres échangés, suite à la défaillance de la condition résolutoire. Par conséquent, le délai d’exécution de l’offre est prolongé, dans le cas où la condition résolutoire ne serait pas encore réalisée le 2 décembre 2002 jusqu’à sa réalisation, mais jusqu’au 20 décembre 2002 au plus tard.

8. Règle "du meilleur prix"

Dès la publication de l'offre, si l'offrant acquiert des titres de participation de la société visée à un prix supérieur à celui de l'offre, ce prix doit être étendu à tous les destinataires de cette dernière (art. 10 al. 6 OOPA – règle dite "du meilleur prix"). Selon la pratique de la Commission des OPA, cette règle vaut pendant toute la durée de l’offre et une période de six mois suivant l'échéance du délai supplémentaire (recommandation Big Star Holding AG du 7 avril 2000, c. 8). En cas d'offre d'échange, le prix de l'offre doit être adapté de façon continue aux variations du cours des titres offerts en échange. En conséquence, l’offrant ne doit pas, de la publication de l’annonce préalable jusqu’à l’échéance du délai supplémentaire, acquérir de titres de participation de la société visée à un prix plus élevé, au moment de la conclusion du contrat, que la "valeur actuelle" de l’offre (recommandation Esec Holding AG du 3 juillet 2000, c. 5 ; précisée dans la recommandation Cementia Holding AG du 27 mai 2002, c. 5). Dans la présente offre d’échange, cette valeur correspond à la contre-valeur de treize actions CGEM. Après l’exécution de l’offre et pour une durée de six mois, CGEM ne doit pas acquérir de titre de participation de CFM à un prix supérieur à la valeur de l’offre d’échange au moment de son exécution. L'organe de révision doit confirmer le respect des règles susmentionnées (art. 27 OOPA).

9. Publication

Conformément à l'art. 23 al. 3 LBVM, la présente recommandation sera publiée sur le site Internet de la Commission des OPA le jour de la publication du prospectus d’offre, soit le 17 octobre 2002.


10. Emolument

L’offre de CGEM soumise le 26 septembre 2002 à la Commission des OPA porte sur 459'593 actions au porteur CFM. Selon l’art. 62 al. 4 OOPA, le montant de l’offre est de CHF 289'044'472.--. Conformément à l’art. 62 al. 2 OOPA, l'émolument à la charge de l’offrant s'élève à CHF 117'800.--.


En conséquence, la Commission des OPA adopte la recommandation suivante:

  1. L’offre publique de Compagnie Générale des Etablissements Michelin est conforme à la loi fédérale sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières du 24 mars 1995.

  2. La Commission des OPA accorde les dérogations suivantes à l’Ordonnance sur les OPA (art. 4) : soumission de l’offre à une condition résolutoire (art. 13 al. 4), libération de l’obligation de respecter le délai de carence (art. 14 al. 2), réduction de la période d’offre à dix jours de bourse (art. 14 al. 3) et prolongation du délai d’exécution (art. 14 al. 6) conformément au chiffre 3 ci-dessous.

  3. Dans le cas où les actions nominatives CGEM émises dans le cadre de l’offre ne seraient pas encore cotées et admises au négoce au Premier Marché d’Euronext Paris SA le 2 décembre 2002, le délai d’exécution de l’art. 14 al. 6 OOPA est prolongé :

    a. jusqu’à la cotation et l’admission de ces titres, et

    b. au plus tard jusqu’au 20 décembre 2002. 

  4. La présente recommandation sera publiée sur le site Internet de la Commission des OPA le 17 octobre 2002.

  5. L'émolument s’élève à CHF 117'800.--.


La présidente de la délégation:

Anne Héritier Lachat

Les parties peuvent rejeter la présente recommandation par un acte écrit qui doit parvenir à la Commission des OPA au plus tard cinq jours de bourse après réception de la recommandation. Ce délai peut être prolongé par la Commission des OPA. Il commence à courir en cas de notification par télécopie. Une recommandation non rejetée dans le délai de cinq jours de bourse est réputée acceptée par les parties. Lorsqu'une recommandation est rejetée, n'est pas exécutée dans le délai fixé ou lorsqu'une recommandation acceptée n'est pas respectée, la Commission des OPA transmet le dossier à la Commission des banques pour ouverture d'une procédure administrative.


Communication:

  • aux parties, par l'intermédiaire de leur conseil,
  • à la CFB.